L'Argentin Victor Manuel Fernández, 60 ans, évêque de La Plata (Argentine), un proche de François, deviendra en septembre le nouveau théologien en chef du Saint-Siège. Ce poste-clé a été occupé au temps de Jean-Paul II par le cardinal Ratzinger, devenu lui-même pape sous le nom de Benoît XVI. Mais c'est surtout la façon dont la nomination de Victor Manuel Fernández a été annoncée, le 1er juillet, qui indique un changement au Vatican. En effet, elle s'est assortie d'une inhabituelle lettre du pape réorientant les missions du dicastère pour la doctrine de la foi.
Alors que la réforme de la Curie promulguée en mars 2022 par le pape assignait au dicastère de la doctrine de la foi de «veiller à ce que ne manque pas une réfutation adéquate des erreurs et des doctrines dangereuses répandues parmi le peuple chrétien», François, dans cette lettre, nuance, le propos: il confie au théologien argentin la mission de «donner raison à notre espérance, mais pas comme des ennemis qui montrent du doigt et condamnent» ainsi que cela a pu être le cas à «d'autres époques». Une allusion à l'ancienne Congrégation du Saint-Office – nom, jusqu'en 1965, de la Congrégation pour la doctrine de la foi – institution traditionnellement chargée de veiller à «d'éventuelles erreurs doctrinales» dans les enseignements des pasteurs ou des théologiens. Le pape pourrait peut-être faire allusion aussi à des décisions plus récentes. On se souvient que le 15 mars 2021, le dicastère pour la doctrine de la foi avait déclaré illicite la bénédiction de couples homosexuels. Quelques jours plus tard, François avait confié à un visiteur sa perplexité devant l'opportunité de ce texte.
Le changement de perspective est considérable. Le pape, dans le catholicisme, est le fondement de l'unité de l’Église, laquelle implique une même profession de foi: il n'est pas imaginable qu'il renonce à son autorité magistérielle. Mais l'orientation donnée au travail du nouveau préfet du dicastère pour la doctrine de la foi laisse entendre que sa mission sera directement ordonnée à l'évangélisation.
Mgr Victor Manuel Fernández semble particulièrement taillé pour la tâche. Il passe pour l'une des principales plumes du pontife argentin depuis son élection en mars 2013. Il aurait notamment collaboré à l'exhortation apostolique «Evangelii Gaudium» («La joie de l'Évangile», 2013) – le programme du pontificat, axé sur la mission – et à l'encyclique «Amoris Laetitia» («La joie de l'amour», 2016), qui a ouvert la possibilité de communier aux couples divorcés remariés. Ses écrits révèlent un effort constant pour dialoguer avec la société, et pour prendre en compte la dimension spirituelle de la foi. En 1990, sa thèse de théologie portait sur la relation entre la connaissance et la vie. Tout un programme.
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