50 ans d’enquêtes dans Le Pèlerin avec la bande dessinée Pat’Apouf

50 ans d’enquêtes avec la bande dessinée Pat’apouf
© Archives Le Pèlerin

En 1938, les premières planches en noir et blanc posent le personnage du détective intrépide.

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À la fin des années 1930, Le Pèlerin déjà pionnier du dessin de presse, souhaite se moderniser et s’adresser à toutes les générations. La bande dessinée sera le fer de lance de cette ambition. Et Pat’Apouf, le héros phare de plusieurs générations de jeunes lecteurs.
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Dans l'imaginaire et les souvenirs de générations de lecteurs, Pat'Apouf a tenu une place de choix. Le détective à la pipe, jovial et perspicace, houppette à la Tintin souvent cachée par un feutre, a tenu en haleine les abonnés pendant… cinquante-deux ans! En 1938, Yves Gervy, son créateur, qui dessinait surtout pour les enfants, s'était présenté à La Bonne Presse pour proposer ses services. C'est finalement pour toute la famille qu'il dessinera! À l'époque, les deux seuls rédacteurs du Pèlerin, le père Guichardan et Henri Save, cherchaient à moderniser l'hebdomadaire et lui proposèrent une page de bande dessinée dans chaque numéro: une révolution!

Gervy imagina alors ce personnage plaisant et surtout humain, avec ses qualités et ses défauts. "Le surhomme infaillible à qui tout réussit, ce n'était pas pour moi!", a-t-il raconté plus tard, ajoutant: "J'ai cherché un nom adapté au physique rondouillard et un peu comique de notre personnage". "Notre" car dans sa maison du Périgord où il dessinait, Yves faisait équipe avec sa femme Germaine, qui se chargeait de la mise en couleurs. Gervy était d'ailleurs un pseudonyme, contraction de leurs deux prénoms.

Couvertures Pat'apouf archives
© Archives Le Pèlerin

À lui seul, le dessinateur Gervy produira seize albums des aventures du héros au costume-cravate toujours impeccable.

Très vite, le détective devint populaire et son auteur s'y attacha au point de continuer à le croquer pendant sa mobilisation en 1939-1940. En juin 1945, lorsque Le Pèlerin reparut après cinq ans d'arrêt, Pat'Apouf reprit donc ses aventures pour s'engager dans la lutte contre le marché noir. Plus tard, il enquêta sur l'espionnage industriel, la passion destructrice de l'argent ou le trafic d'ivoire. Le comique d'avant-guerre avait entretemps disparu. Les aventures se déroulaient dans un climat plus angoissant, avec des morts violentes étonnamment nombreuses pour une publication catholique destinée à la famille. Heureusement les bandits se repentaient et priaient avant de mourir! En 1956, au moment du passage à l'offset qui permit d'agrandir les planches, Gervy éprouva le besoin de se renouveler: il créa Jacky, un nouveau personnage, passager clandestin d'un navire qui ramenait le détective d'Amérique en France. Les longues phrases narratives disparurent au profit d'un style plus léger qui redevint comique, voire burlesque.

La dernière planche de Gervy parut le 27 mai 1973, dans le numéro spécial que publia Le Pèlerin pour les cent ans du magazine. Le dessinateur parti à la retraite, Jean Ach reprit le flambeau. Deux autres dessinateurs – Ballofet et Gulcis – suivirent après le décès de Jean Ach, jusqu'à l'été 1990, date à laquelle Pat'Apouf tira définitivement sa révérence.

Entretemps, un fructueux compagnonnage avec la bande dessinée s'était ainsi esquissé: dès 1962, le journal publia en feuilleton des planches d'Astérix, dont Astérix chez les Belges en exclusivité en 1977. L'année suivante, il récidiva avec L'âge ingrat, d'Achille Talon.

Archives Pèlerin Astérix
© Archives Le Pèlerin

Astérix et Obélix

En 1977, accompagnant le phénomène de la bande dessinée populaire, Le Pèlerin fait sa Une avec les deux Gaulois les plus célèbres de l'Hexagone. Certains racontent même qu'Uderzo se serait inspiré, pour créer son personnage d'Obélix, de la bonhomie légendaire d'un religieux assomptionniste breton qui était devenu son ami.

L'humour, toujours l'humour

Le Pèlerin, magazine familial et populaire, n'a jamais manqué d'humour. Le père Vincent de Paul Bailly avait bien compris que pour faire lire le plus grand nombre, il fallait lui faciliter la tâche. Et quoi de mieux que des illustrations et des images pour cela? En passant par des revendeurs d'occasion, il acquiert ainsi ses premiers clichés et gravures à peu de frais. Puis, il embauche ses premiers dessinateurs pour produire des vignettes d'actualité où la caricature à une bonne place: Lucien Thomin, Guydo, Henriot, Montégut et tant d'autres vont se succéder. Il faut évoquer ici surtout le travail d'Achille Lemot (1846-1909) qui deviendra, dès 1896, l'illustrateur fidèle des tirades virulentes du père Bailly.

Le Pèlerin profite aussi des derniers progrès de la gravure pour multiplier les illustrations inspirées d’œuvres d'art, de scènes historiques etc. L'embauche d'un jeune illustrateur uruguayen talentueux, Eugène Damblanc, dit Damblans (1865-1945) va offrir au titre ses plus belles planches. Ce sont, parfois, de véritables histoires illustrées qu'il compose, préfigurant à sa manière ce que sera après-guerre l'émergence du neuvième art, la bande dessinée. Là, des dessinateurs, souvent formés dans le monde de la publicité, s'en donneront à cœur joie chaque semaine pour édifier ou amuser les enfants. Avant, désormais, d'émerveiller les adultes qu'ils sont devenus.

Par Dominique Lang

Couvertures humour Le Pèlerin archives
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Image de gauche : Si en 1934, les congés payés ne sont pas encore généralisés, les caricaturistes du Pèlerin (8 juillet 1934) s'en donnent quand même à cœur joie pour s'amuser des loisirs de leurs contemporains.

Image de droite : Le 11 octobre 1896, la visite du tsar Nicolas II à Paris fait l'objet d'une pleine page signée Achille Lemot. Caricaturiste acerbe, il ne peut s'empêcher de donner une lecture de politique intérieure à l'événement.

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