Notre-Dame de Paris : 5 ans après l'incendie où en est le chantier ?

Sophie Laurant

Par  Sophie Laurant

Publié le 26/03/2024 à 14h50
Mise à jour le 15/04/2024 à 12h02

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Plus que huit mois avant l'ouverture !
© photos Stéphane Compoint pour Le Pèlerin

L'aiguille de la flèche réapparaît, tout juste sortie de sa gangue d'échafaudages. Les couvreurs vont désormais opérer sur la toiture, puis termineront par la base de la flèche à l'automne. Pour gagner du temps, les grues évacuent de gros modules d'échafaudages qui seront ensuite démontés au sol. Une manipulation de précision au centimètre près !

Cet article est paru dans le magazine Le Pèlerin - Abonnez-vous

Le compte à rebours est lancé : le 8 décembre 2024, les travaux nécessaires à la réouverture de la cathédrale devront être achevés ! Plus de cinq cents personnes y travaillent d'arrache-pied. Sur les toits, avec la pose de la couverture, comme à l'intérieur.

Sur les toits

Plus que huit mois avant l'ouverture !

À 56 m de haut, les maçons-tailleurs de pierre finissent de remonter un pilastre du pignon du transept sud. De nombreux éléments de ces pignons, très endommagés, ont dû être retaillés.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

La statue du Christ, déposée au lendemain de l'incendie, a désormais repris sa place en surplomb du pignon sud. Ses mains levées, dans une attitude de bénédiction sur la ville, ont été resculptées en atelier.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Cette chimère de 100 kg a été, elle aussi, entièrement retaillée en atelier. « Nous n'avions plus qu'un moignon de pierre et une ancienne photo floue. Alors nous avons proposé à l'architecte une restitution qui reprenne la forme de la chimère originale », explique Quentin Muller, dirigeant de l'entreprise Vermorel, l'une des trois choisies pour restaurer les sculptures. Une fois les plans de la pierre ajustés à l'encoche, les artisans fixent un goujon pour assurer la prise entre les deux éléments. Ils posent aussi des points de colle sur la surface afin de terminer de sécuriser l'ensemble en coulant un mortier de chaux liquide.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

La couverture de l'aiguille de la flèche présente ses « écailles » de plomb, ornées de nombreux crochets. Juste en dessous, le sommet du second étage ajouré, en chêne, sera couvert en dernier, après l'achèvement des 3 000 m2 de toiture.

À l'intérieur de la cathédrale

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Eux aussi nettoyés et restaurés, les somptueux panneaux en chêne tendre qui surplombent les stalles des chanoines du chœur. Ils datent de 1715 et sont l'œuvre de grands artistes ornementistes.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Le sol de la cathédrale est pour le moment bouleversé. Le dallage a été déposé. Objectif : moderniser en totalité les près de 200 km de circuits électriques, de chauffage et autres réseaux cachés.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

La restauratrice de sculptures Nathalie Pruha nettoie la Pietà réalisée par Nicolas Coustou, en 1723, pour commémorer le vœu de Louis XIII de mettre son royaume sous la protection de la Vierge : « Je l'avais déjà restaurée cinq mois avant l'incendie, explique-t-elle. Les statues n'ont pas subi de dommages profonds, mais des coulures de plomb et de plastique fondu, provenant sans doute de gaines électriques, ont éclaboussé les tuniques de la statue. Nous avons tout enlevé, sauf un petit résidu tombé dans la paume du Christ, qui témoignera du moment de l'incendie. »

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Au nord-est du chœur, les éclatantes peintures du XIXe siècle de la chapelle Saint-Marcel, tout juste restaurée, apparaissent au fur et à mesure du retrait des échafaudages.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Les grilles du XVIIIe siècle qui ceinturent le chœur font l'objet d'un nettoyage, à la vapeur d'eau puis à la compresse (photo ci-dessous), afin de permettre à la dorure de resplendir à nouveau.

Plus que huit mois avant l'ouverture !
Plus que huit mois avant l'ouverture !

Les plaques de plomb de 52 kg chacune ont été montées par une grue jusqu'au faîte de la charpente du chœur.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Les couvreurs fixent sur les plaques un palonnier à roulettes, sorte d'armature métallique qui permet, avec l'aide d'un treuil, de faire glisser la plaque jusqu'en bas de la charpente, dans l'interstice avec l'échafaudage. Cette technique novatrice limite les manipulations. Huit à douze plaques sont posées chaque jour.

Plus que huit mois avant l'ouverture !

Les huit « grands ducs » de la flèche surmontent les poteaux d'arêtes en bois les plus hauts. Refaites en atelier, ces véritables « chimères métalliques » sont issues de l'imaginaire romantique de l'architecte en chef Viollet-le-Duc.

Le plomb sous surveillance

Lors de l'incendie de la cathédrale, le 15 avril 2019, les 460 tonnes de plomb de sa toiture ont fondu, une partie se répandant sur la zone, sous forme de poussière. Cette situation a suscité l'inquiétude d'associations de victimes de pollutions ou de protection de l'environnement dont certaines ont déposé plainte, provoquant, en avril 2023, l'ouverture d'une information judiciaire.

Selon l'Établissement public chargé de la restauration de Notre-Dame, maître d'ouvrage du chantier de restauration, « seul le plomb, par sa souplesse, permet de restituer la richesse des décors de la couverture » et, pour l'équilibre du monument, il est important de retrouver une toiture de même poids. L'organisme rappelle aussi que les questions de protection sanitaire et environnementale sont prises très au sérieux, en lien étroit avec l'Agence régionale de santé, et qu'à ce jour « aucune plombémie n'a été relevée chez ceux qui travaillent sur le chantier et sont régulièrement testés.

Par ailleurs et pour éviter tout nouveau sinistre, un système anti-incendie entièrement repensé se trouve en cours d'installation avec un système de brumisation des combles : une première pour une cathédrale française. » Il est vrai que le plomb ne devient dangereux qu'en cas d'ingestion ou d'inhalation des poussières, ce qui n'est pas le cas avec des charpentes inaccessibles. De plus, un traitement des eaux de pluies ruisselant des toitures de la cathédrale, qui n'existait pas auparavant, est prévu. Certains plaident pour aller vers le « risque zéro » arguant que des poussières à faible dose sont relâchées au fil du temps dans l'atmosphère, quand d'autres estiment qu'on surévalue les méfaits de ce métal, très présent aussi dans les tuyaux d'orgue et les vitraux depuis des siècles !

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