Le vent souffle fort dans les steppes. Le cavalier, un gentilhomme toungouse, esquissé en quelques traits clairs et vifs, a dû mettre pied à terre. Scrutant l'horizon, il protège son regard avec la longue manche de sa tunique. Son impressionnante monture, elle aussi, doit se protéger, et tourne le dos au souffle qui dévale sur elle. Sa queue et sa crinière témoignent à elles seules de la force du vent qui fait grelotter le cheval, dont la tête abaissée près de sol cherche un peu de répit. Ce souffle pourtant, c'est la vie même qui traverse le monde et qui vient animer les drapeaux de prières bouddhiques, que les Mongols accrochent à l'arrière de leur yourte. Ce souffle, c'est aussi l'appel qu'entendent ces peuples nomades qui, déplaçant leurs troupeaux et leurs familles, vont là où les vents les mènent. Le peintre Zhao Mengfu, qui nous restitue la scène, lui, n'est pas un Mongol.
Il fréquente plutôt les imposantes bâtisses de bois et de pierre des Song, la famille impériale chinoise. Mais après la chute de cette dernière sous les coups de la poussée mongole, ce fonctionnaire lettré de la cour va accepter de travailler pour les nouveaux maîtres des lieux, la dynastie mongole des Yuan. Son art créera un pont entre ces deux mondes. Il s'inspire pour cela de l'œuvre d'un lointain prédécesseur, le peintre Han Gan qui, au VIIIe siècle, s'était fait connaître par sa fascination pour les chevaux. Zhao Mengfu donne toutes ses lettres de noblesse à ces montures mongoles, un peu rustres mais si résistantes aux intempéries, si dures au combat, et si persévérantes dans les longues marches.
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