En Lorraine, un village se mobilise pour sauver son clocher
"Cette église, c'est l'âme de Saint-Maurice-aux-Forges et de ses 101 habitants, confie Patrick Mangin, son maire, un agriculteur à la retraite. Je donnerai tout pour la sauver." Fermée au public depuis 2002 pour des raisons de sécurité, 400 000 euros sont nécessaires pour assurer sa réouverture. Un montant impossible à assumer pour une municipalité au budget annuel de 60 000 euros.
Il y a quelques jours, il a versé l'intégralité de son indemnité d'élu sur tout son mandat, soit 50 000 euros, pour financer sa restauration. Quelques semaines plus tôt, il avait rassemblé pour la première fois la dizaine de membres de l'Association de sauvegarde du patrimoine de l'église, tout juste créée. Son objectif: fédérer toutes les énergies, collectives (associations, collectivités territoriales, entreprises) ou individuelles. Et, bien sûr, collecter des fonds pour payer les travaux de réfection.
Rapidement, les dons des villageois affluent. Certains se sont même engagés à donner 1 000 euros par an pour assurer l'entretien de l'édifice. "Chacun apporte sa pierre en fonction de son expérience et de ses talents", relate Isabelle, une habitante qui se charge de faire connaître le projet dans la presse locale. Le combat est devenu celui de tout un village. Pour "l'enfant du pays" qu'est le maire, ce soutien est émouvant: "J'en ai les larmes aux yeux", raconte-t-il
Un pugnacité contagieuse
L'élan s'étend jusqu'aux villages voisins. Dans la paroisse, où le curé peine à faire vivre, seul, les dix-neuf clochers dont il a la charge, la nouvelle fait des émules et les paroissiens prennent part à l'aventure. "Nous avons du mal à faire vivre nos églises sur ce territoire vieillissant et défavorisé, reconnaît Pascal Marchal, coordinateur paroissial, une telle initiative citoyenne nous revigore: il n'y a qu'en alliant nos forces que nous pourrons construire le bien commun."
À la Fondation du Patrimoine de Lorraine aussi, on se félicite de l'engouement suscité par le maire. "Cette dynamique collective nous a beaucoup surpris et émus, reconnaît Anne-Marie Betka, chargée de mission, nous n'avions jamais vu cela." Comment expliquer une telle mobilisation? "Nous sommes très attachés à notre clocher, assure Patrick Mangin. Il symbolise notre identité, témoigne de l'histoire du village depuis plusieurs siècles." Au XIXe siècle, l'église aurait d'ailleurs été entièrement construite grâce aux dons des habitants, dont une plaque gravée porte les noms, au sein de l'édifice.
L'église, le coeur battant du bourg
Depuis, le village a subi l'exode rural, divisant par quatre sa population. Pour le maire, qui se présente comme "un catholique un peu égaré", l'enjeu est bien plus large que la seule cause du patrimoine. Il veut faire de l'église le cœur battant du village. Pour l'ouvrir au culte, certes, mais aussi pour en faire un lieu de vie sociale et culturelle. "Nous voulons que l'église redevienne ce qu'elle a été: un espace de rencontre où familles et habitants se retrouvent facilement", explique Isabelle.
Avant même d'entreprendre les travaux, le maire prévoit déjà de rencontrer l'évêque de Nancy et Toul, Mgr Pierre-Yves Michel. "Je voudrais lui présenter des projets et voir jusqu'où il nous autorise à utiliser les lieux." Théâtre, cours de musique, atelier de lecture, veillées de contes pour les enfants… Les idées ne manquent pas. Le chantier devrait s'étaler sur plusieurs années, mais la réouverture de l'édifice, elle, pourrait intervenir d'ici à Noël. Quant au maire, il a déjà prévu de se représenter en 2026, aux prochaines élections municipales, avec la promesse de donner, une nouvelle fois, ses indemnités à sa chère église.
Commentaires
berbergier
j.cazenaud
Wylleman Maurice.
Père Noël
Anne m