Et si les animaux avaient quelque chose à nous apprendre ? Depuis des années Marie-Christine va à leur rencontre, passionnée par ce qui se joue entre les éleveurs et leurs bêtes.
Des poneys. Sauvages. Le souvenir de leur rencontre a durablement marqué la mémoire de l’enfant qu’était alors encore Marie-Christine Favé. Non pas qu’elle ne connût rien à la nature : son enfance, elle l’a passée à la campagne, entourée d’animaux. Mais cette rencontre-là fut si forte qu’elle orienta durablement sa vie d’adulte à venir.
La voilà devenue vétérinaire, comme une évidence. Avec une sensibilité qui l’a assez vite fait remarquer : « C’est souvent à moi qu’on confiait les cas de certaines vaches bizarres ou difficiles, s’amuse-t-elle encore. Il faut dire que ces animaux ne me faisaient pas peur. J’ai ainsi appris, peu à peu, certains codes relationnels à respecter entre l’humain et l’animal que même certains vieux agriculteurs ne perçoivent pas après des années de coexistence. »
Assez naturellement, la jeune vétérinaire se tourne vers des agriculteurs bio, dont beaucoup cherchaient des alternatives non chimiques pour soigner leurs bêtes.
« Mais un jour, lors d’une visite en Ardèche, un éleveur de chèvres me dit : “C’est bien si ça marche, vos traitements alternatifs. Mais, au fond, je ne sais toujours pas ce qu’a vraiment mon animal malade’’. » Un vrai déclic pour tenter une autre approche.
« Car si, avant d’injecter des médicaments, on prend le temps de regarder sa manière d’être, son caractère, sa morphologie et bien d’autres signes, l’animal lui-même vous donne les clés de son mal-être. »
À 47 ans désormais, et plus de vingt-cinq ans d’expérience, Marie-Christine s’émerveille encore. « C’est sans doute parce que les animaux ne passent pas par le “verbal’’ qu’ils nous connectent plus facilement à l’essence même du vivant. Ils nous invitent à rester nous-mêmes, à ne pas séparer, par exemple ce que nous montrons de nous-mêmes et ce que nous ressentons intérieurement. »
Une école de l’honnêteté et de l’humilité, qui désamorce peurs ou envies de domination.
Passant de ferme en ferme, un peu partout en France, Marie-Christine, qui s’est aussi formée dans la relation d’aide psychologique, regarde et écoute aussi bien l’éleveur que les animaux de sa ferme – vaches, chevaux, moutons. Sans oublier les animaux sauvages, jamais très loin.
Avec les fermiers ou les collègues vétérinaires, son approche si singulière fait que « ça passe ou ça casse ». Pour autant, Marie-Christine sait qu’elle ne peut rien forcer :
"Je ne me considère pas comme une missionnaire de la cause animale.
"
Mais quand ça passe, l’éleveur découvre souvent un monde nouveau dont il pressentait souvent intuitivement l’existence.
« C’est extraordinaire de voir que, quand on aide quelqu’un à changer son regard sur l’animal, c’est son univers relationnel tout entier qui change. Notamment avec ses proches. »
Son émerveillement, Marie-Christine l’enracine aussi dans une foi chrétienne, simple et essentielle. « Cette foi nous fait regarder aussi la noirceur de l’existence en face. Je peux ainsi accueillir ma propre vie de patachon et aussi accompagner des réalités douloureuses dans mon travail, sans être juge de quiconque. »
Car être éleveur, c’est aussi passer sans cesse de la vie à la mort. « Or je suis surprise de voir la justesse que beaucoup d’animaux d’élevage expriment face à la mort, quand on les accompagne avec respect. J’essaye d’aider, par exemple, les éleveurs au moment où leurs bêtes sont emmenées à l’abattoir. Afin qu’ils retrouvent la juste action de grâce pour ce que ces animaux leur donnent. »
Paru le 5 avril 2018
Vos commentaires
1 Commentaire RéagirRegard sur l' animal
Anais 03/03/2016 à 17:37Quel bonheur de voir ce changement de regard sur l' animal. Oui l' animal ressent, est sensible, peut avoir peur, souffrir de la séparation ( veau avec sa mère. Etc...). L'être humain lui a donné une injure pour nom : " bête" afin de mieux ... lire la suite Cacher